recommencer, recommancer, recommanger, rerommanger

Pau, 25 ans plus tard

 

Aujourd’hui on ne parlera pas du couloir

des monstres petits

tapis sous la moquette à pois blancs

de la lumière et du bois

car les verrous

 

Compter les pieds

aujourd’hui ça suffira

pour ne pas oublier les pas

et les peut-être

 

La bête qui grignote et crécelle

avec des stridulations

à la place de ses dents aigües

nul n’est dupe

mon innocence.

 

……………….

 

J’ai cinq bras incontinents qui m’embarrassent

la tête hachée façon traiteur du dimanche quand la messe

Des poils ont poussé souvent sur tous ces continents

avec des mains au bout qui n’en peuvent

Par neuf

je peux faire la pieuvre quand tu veux

retourner sous la surface.

 

………………

 

La faute aux skis qu’on n’a pas sortis

ce qui dérangeait est resté là au chaud

comme les puces qui n’ont pas gelé avec l’hiver

trop doux à moins que d’ailleurs mais pas d’ici en tout cas

mais j’ai mon anorak mon pull d’Irlande

les chaussettes de gros tricots en laine des Pyrénées

et deux cachets d’aspirine du Rhône que m’a refilés Pagnol

pour la bourrasque, le souffle de maman et la peur qui vont avec il m’a dit

face aux nuages qui godillent grave j’ai confiance

 

……………………………………….

 

Le kiosque sacré colonel fier comme un banc

au milieu du parc ou peu s’en faut

rasé de près il tient le rang et rien

pas un souffle pas une note pas un son

à moins d’un oiseau ne le traverse

vieux fantôme

 

…………………………

Chaussée des géants les dents cariées à force de verdure

un filet d’eau dans leur gorge fleurie

en bout de course abandonnés ou presque

des fois des homos

des fois des capotes des fois du sperme des fois les deux

des fois je viens les regarder

immobiles

on se parle

……………..

 

Le château de la plaine d’ici

qui les subjugue promontoire

et promesse

 

………

J’ai joué gros dans ma vie perdu tout

j’ai bien mangé

des fois pas trop des fois pas du tout

et encore moins certains jours

je n’ai plus peur maintenant je suis tout à fait seul

C’est vide cette ville et dispersée ma vie

 

……

Les mots sont assez inutiles

mais ils existent

là et las

assez imparfaits pour faire croire à leur vie

 

………

Sur le boulevard à l’est du boulevard

pas loin de la chaussée des géants tout près du kiosque

pas loin du casino au temps d’avant au temps d’antan

autant que jamais je n’aurais dû remettre mes pas

dans ce passé où je trépasse et trois fois plutôt qu’une

sur l’est du boulevard une matrone sanglée de noir

on l’appelait la cafetière

vendait ses charmes

 

…..

Comme elle je n’attends plus rien que d’improbable.

 

Pau, le 31 janvier 2011.

 

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J’ai espéré le bouleau

attentif à l’écorce

je suis à peine né

mais son aubier au bout des doigts

toujours m’appelait vers toi

 

sous mes ongles perlaient des larmes

de petits spasmes de verdure

et des étendues moites où les grenouilles

vertes coassantes brillantes et lisses

 

du bout des doigts où la pulpe

si fine qu’elle danse au toucher et caresse tes lunes

j’ai espéré revivre

 

A l’horizon de tout cela, des montagnes montaient la garde

Ici, ils les nomment Pyrénées.

 

à Pau, ce même trente et un janvier du vingt et unième siècle

 

C’est un parc au milieu d’un château,

une fête si peu foraine, à moins que Sauguet

juste un air de piano plus loin que dans mon Sud

ruissellent des cigales à l’ombre des platanes

J’y fus heureux

Nous y eûmes très chaud.

………..

 

J. -P. Mélot

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